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Jacques Stotzem prend l’AER

.Jacques Stotzem a fait le choix récemment de collaborer dorénavant avec AER Amps pour son amplification sur scène. Au-delà des spécifications techniques qui peuvent motiver ce genre de décision, j’ai eu envie d’en savoir plus. J’ai rencontré Jacques pour un entretien à propos de ce changement. J’avais envie de lever le voile sur les relations entre un fabricant de matériel et un artiste qui voyage de scène en scène.

Jacques Stotzem chez AER

Jacques Stotzem chez AER

Jacques, celles et ceux qui te suivent de longue date savent à quel point tu es quelqu’un de fidèle dans tes relations amicales et professionnelles. Tu changes également assez rarement de matériel. Le fait de rejoindre l’équipe d’AER amps a pu être une surprise pour certains et pour certaines. Pourquoi as-tu décidé de changer à ce stade de ta carrière artistique ?

Jaques Stotzem : Comme tu dis, j’ai une grande fidélité dans mes relations en général et aussi dans mes relations avec le matériel parce que je suis plutôt quelqu’un de la vieille école. C’est-à-dire que bon, j’aime le son de ma guitare, j’aime le son que je peux avoir avec le matériel que j’utilise. Je n’ai pas forcément envie de changer.

Mais j’ai découvert un ampli AER qui me correspondait, c’est-à-dire un ampli compact et puissant, avec vraiment une très belle sonorité, une très belle réverb. Et je pense quand même qu’en tant qu’artiste, il y a une relation qui s’installe entre une firme et un artiste. Je sentais aussi que ma relation professionnelle avec Fishman arrivait un peu dans une sorte de voie de garage.

Justement, qu’est-ce que tu considères comme important dans la relation entre toi et les marques ?

J.S. : Moi en ce qui me concerne, c’était avant tout l’attrait de matériel que j’aime et que j’aime utiliser. Je n’ai jamais de ma vie utilisé une guitare, ou des cordes ou un ampli que je n’aimais pas, donc je dois d’abord être profondément convaincu du matériel que j’utilise. C’est une première chose. Mais aussi en tant qu’artiste vis-à-vis d’une firme, il y a une sorte de relation win-win. C’est-à-dire qu’on établit une relation en se disant voilà, je vais utiliser ton matériel parce que c’est quelque chose dont je suis convaincu professionnellement en tant qu’artiste.

La firme de son côté, si tu veux, doit te permettre d’avoir autre chose que l’ampli ou des cordes de guitare ou même une guitare. C’est-à-dire c’est une relation professionnelle d’échange, par exemple des invitations à jouer dans tel festival ou bien dans un salon professionnel, des choses comme ça. Et à ce niveau-là, si tu veux dans ma relation avec Fishman, il ne se passait plus rien.

Quels ont été les facteurs clés qui ont influencé ta décision ?

J.S. : Géographiquement, c’est beaucoup plus simple d’avoir une relation avec une firme européenne qu’avec une firme américaine. AER amps, que je connais depuis très longtemps a sorti cet ampli, le Compact XL. J’ai eu l’occasion, il y a plus d’un an déjà, de l’essayer dans un salon de musique à Prague. Et j’ai vraiment, vraiment été épaté par le son.

Et c’est une relation qui s’est établie avec AER petit à petit. Je sentais vraiment l’intérêt de la firme d’avoir un nouvel artiste dans leur équipe. Après les avoir rencontrés, avoir visité la fabrique, je me suis rendu compte qu’il y avait une relation qui pouvait être établie et qui pouvait durer sur le long terme. Pour moi c’est cette optique d’un échange réciproque, en plus de la conviction profonde que le matériel sonne vraiment bien qui m’ont décidé.

Moi, ce que je cherche toujours dans un ampli, c’est un ampli qui ne colore pas le son. Je n’attends pas le son d’un amplificateur avec une certaine coloration. J’attends que l’ampli me donne le son de ma guitare tout simplement. C’est un son acoustique et dans cette optique-là, le AER Compact XL 80 remplissait à 100 % cette attente. Si tu veux, mon objectif de base, c’est toujours d’abord d’aimer le son.

Il y avait pour moi aussi une question un peu philosophique ou éthique. Même si c’est de l’électronique, donc que les pièces viennent d’Asie, tout est assemblé à l’usine qui est à 150 km de chez nous. Si j’ai un souci ou quoi-que-ce-soit, je prends ma voiture et 2 heures après je suis à la fabrique. Il y a un grand nombre de personnes qui travaillent aux soudures dans un environnement protégé. Même les housses fournies avec les amplis sont faites en Europe. Au niveau de la démarche, de la production, du commerce, je trouvais aussi que ça me correspondait beaucoup mieux. Dans le sens de me dire, est-ce que notre société ne devrait pas un peu changer vers un mieux à ce niveau-là ?

Peut-on dire que tu préfères ne pas trop t’intéresser à la technique et au matériel. Tu cherches juste la meilleure solution, une certaine efficacité ? Serais-tu d’accord avec la phrase « Le meilleur matériel c’est celui dont on ne parle pas ? ». Le célèbre « setup and forget ».

J.S. : Je pense que c’est ça. J’ai juste besoin de ma ligne de guitare qui mélange déjà 2 signaux. Un capteur de chevalet et un microphone. Et ça part via un Jack mono qui mélange les deux.

Je suis convaincu qu’un capteur de chevalet peut être aussi bon qu’il veut, mais il n’est jamais assez bon pour reproduire le son d’une guitare acoustique. Donc ce qui va reproduire le son d’une guitare acoustique, c’est le système le plus ancestral, c’est un micro devant la guitare ou un micro à l’intérieur de la guitare. C’est quand même toujours ce qui va rendre le son d’une guitare le plus naturel. Mais ça peut engendrer des problèmes de feedback. C’est le capteur qui va donner la dynamique au son et le microphone va amener du naturel. Je trouve que cette manière de mélanger 2 signaux dans un signal mono reste pour moi vraiment la meilleure solution.

Quand tu disais que le meilleur matériel est celui dont on ne parle pas, moi je veux surtout voyager léger. Parce qu’il n’y a rien de plus embarrassant que de se retrouver avant un concert à devoir faire un soundcheck interminable parce que tu as des tonnes de choses à régler. Le soundcheck c’est toujours très fatigant, éprouvant. Je veux que ça dure une demi-heure au maximum. Comme ça tu conserves toute ton énergie pour le concert. C’est un objectif que j’ai toujours eu. Je me rends compte que c’est utile pour l’efficacité du concert, d’avoir gardé ton énergie et de ne pas la perdre dans un soundcheck interminable.

As-tu déjà envisagé des systèmes stéréo avec plusieurs capteurs/microphones ? Par exemple pour exploiter le second canal de tes amplis ?

J.S. : Non, jamais non, tout simplement parce que voilà, j’ai le pick-up que j’utilise, le Fishman Ellipse Blend dont je suis toujours très content. Mais ce n’est vraiment pas quelque chose de techniquement compliqué. Je ne suis pas du tout sûr que les systèmes stéréo que j’entends parfois amènent un meilleur son. Mais ça, c’est une conviction en tant qu’artiste, c’est un goût personnel. Ça amène d’autres perspectives peut-être, mais ce ne sont pas des perspectives qui m’intéressent parce que comme je l’ai dit, je fais partie de la vieille école.

Ce côté « old school », je l’appelle toujours la génération « Plug-and-play ». J’arrive, je branche ma guitare dans un ampli ou dans une DI box et le son va dans la sono, un point c’est tout. Je ne cherche pas plus.

Mais si maintenant, on joue avec des boucles ou des choses comme ça, on peut utiliser un autre capteur pour des boucles. Et puis remixer avec autre chose qu’on rejoue par-dessus. Je comprends qu’on soit intéressé par ce type de systèmes pour utiliser des effets différents.

Mais moi, pour la musique que je fais, je n’y vois pas d’intérêt. C’est quelque chose avec lequel je ne me casse pas trop la tête, parce que je sais qu’à terme ça va être trop difficile à gérer.

Le public a-t-il réagi à ce changement de son dans tes performances live depuis que tu utilises le nouvel ampli ?

J.S. : Non, je n’ai pas vraiment eu de réactions d’étonnement concernant une différence de son, tout le monde dit qu’il est très bon. Alors pour moi, c’est le principal. Il y a des guitaristes qui viennent me dire, j’ai vu que tu avais changé d’ampli et j’aime vraiment beaucoup le son. Ils ne me disent pas que le son est différent ou que le son a changé ou que le son est étrange. On reste dans une continuité, si tu veux. À partir du moment où ma guitare est amplifiée, elle sonne comme ma guitare.

Effectivement, je t’ai entendu jouer sur l’ampli AER à Villers lors du tournage du trailer de « Histoires sans mots » et je n’ai pas été surpris par le son. Alors, dit comme ça, ça peut sembler être une critique. Mais en fait, c’est tout le contraire dans le sens où ce son m’a paru normal. C’est le son que j’attendais, c’était le son de ta guitare comme je l’ai toujours entendu.

J.S. : Je pense que dans le monde de la guitare acoustique avoir un ampli transparent, c’est important. Je pense qu’on n’est pas dans la même approche que les guitaristes électriques qui recherchent justement le son d’un vieil ampli Vox ou le son d’un vieil ampli Marshall, par exemple. Là, la couleur de l’ampli a son importance. Mais dans la guitare acoustique, pour les guitaristes, le but n’est pas là.

Ça fait des années que tout le monde se casse la tête pour reproduire le son naturel de la guitare. Je crois que le but d’un bon ampli acoustique c’est justement d’avoir cette transparence.

Tu as opté pour le modèle AER compact XL. Pourquoi celui-là ? Est-ce que ce n’est pas une puissance un peu limitée pour certaines scènes ?

J.S. : Non non, pas du tout. On regardera si tu veux la fiche technique mais en fait je pense qu’il a 200 watts de puissance. En fait, je me surprends moi-même souvent au soundcheck. Je dois faire attention à la puissance que je mets parce qu’il est vraiment très puissant. Honnêtement, il a vraiment du coffre comme on dit. Il n’est pas si compact que ça. Parce qu’AER fait des versions compactes qui sont nettement plus petites.

AER Compact XL (image AER)

AER Compact XL (image AER)

Il y a des caractéristiques spécifiques à cet ampli qui ont joué un rôle clé dans ta décision ? Tu as testé plusieurs modèles ?

J.S. : Pour moi la référence clé si tu veux c’était de ne pas avoir un ampli où le focus est mis sur le registre aigu. Beaucoup d’amplis acoustiques malheureusement le font, mais c’est normal. Peut-être que les gens qui jouent en groupe cherchent plutôt cette sonorité plus aiguë. Moi, je voulais un ampli qui me donne tous les registres dans leur grande richesse que ce soit les basses, le médium ou l’aigu. Et avec cet ampli, il y a tout. Le registre grave est vraiment fort profond avec de beaux médiums chaleureux et les aigus pas trop forts. Donc pour moi, c’était vraiment la version idéale.

Je suis allé chez AER pour me décider sur quel ampli j’allais jouer. Andreas Falke qui est la personne qui s’occupe des relations avec les artistes m’a dit : « Je te conseille d’essayer celui-là en premier par rapport à ce dont on a discuté ». Et effectivement quand j’ai essayé les autres, je savais directement, en un accord, que le Compact XL allait être mon ampli par rapport aux autres qui sont des versions plus petites.

As-tu apporté des ajustements à d’autres réglages sur ta guitare ou à ta technique de jeu ?

J.S. : Rien du tout, même pas sur mon préampli. Ça rejoint ce qu’on disait avec le fait de rendre le son de la guitare de la manière la plus transparente possible.

Si tu pouvais changer une seule chose sur cet ampli ou définir un ampli selon tes propres spécifications quels seraient tes désirs en fait ?

J.S. : Je l’ai déjà fait, figure-toi. Parce qu’en fait le premier ampli que j’ai eu, c’était l’ampli qui m’a servi de test. Je l’ai pris pour voir si je pouvais faire tout ce dont j’avais besoin avec cet ampli-là. J’avais remarqué quelque chose qui m’ennuyait un peu. C’est-à-dire que quand je joue en concert, ma ligne de guitare est généralement reprise par une sono plus importante. Mon ampli me sert alors de retour. J’avais remarqué que la réverb de l’ampli ne passe pas dans la ligne XLR de l’ampli. Or c’est cette sortie que j’utilise comme DI box. Ça m’ennuie un peu parce que du coup je devais utiliser la sortie Jack pour retrouver la réverb. Et donc je devais utiliser une DI box supplémentaire. Je m’étais dit au début que c’est juste une question d’habitude. Mais c’était moins pratique pour moi.

En plus la réverb de l’Ampli est très belle. Elle a beaucoup de profondeur et je trouvais dommage de de devoir m’en passer si j’utilisais la ligne XLR.

J’ai donc demandé un 2e ampli avec une customisation de la ligne XLR et maintenant la réverb est mise sur la ligne XLR de mon ampli.

AER Compact XL (image AER)

AER Compact XL (image AER)

Et c’est le seul ajustement que j’ai demandé. J’ai demandé chez AER, si c’était possible ? Et ils m’ont dit que c’est sans souci parce que tout est fait à l’usine et ça ne leur posait aucun problème, techniquement.

C’est peut-être une illustration de pourquoi il est intéressant pour une firme d’avoir des artistes professionnels qui travaillent avec leur matériel. Ils peuvent donner ce type de feedback et d’ajustements, pour des modèles futurs peut-être.

■ DvL – Merci à Jacques Stotzem de m’avoir accordé cet entretien pour le site guitar.vanlochem.be
    Entretien enregistré le 26.08.23

2 Commentaires

    • Francis Jurdan sur 29 août 2023 à 22 h 21 min
    • Répondre

    Très bel article et en effet depuis des ans je remarque que AER est vraiment ce qui va le mieux aux instrument acoustiques.
    Ils on aussi ca de génial dans les petites tailles que même sur une grosse scene tu le met sut un pied micro un peu derrière toi et face au public et tu a ton retour perso avec QUE TON SON, dans le retour devant tu demande le reste. Tu garde TON son, peu jouer le mix avec le reste en avançant ou reculant un peu et framboise sur le cake, tu a souvent bien moins de risque de larsen une foi derrière toi plutôt que face à toi.
    Bravo pour tou ce que vous faite Jaques et toi ces temps-ci, ca ne chôme pas.

    1. C’est le système que j’utilise depuis longtemps. L’ampli derrière moi, “dans l’oreille”.

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