Les jours de confinement s’enchaînent. Dans mon secteur d’activité, le télétravail se pratique de longue date, et il ne me manque que les sourires des collègues et les trajets en train pour lire et écouter de la musique. Comme maintenant je dispose d’un peu d’espace pour stocker mes guitares, j’en ai profité pour une petite tournée d’inspection. Comme j’ai mis la main sur un stock de vieilles cordes Martin, j’ai décidé de changer les cordes avant de renvoyer ces belles à leur sommeil.
Ma première guitare
L’achat de ma première guitare a été l’occasion de ma rencontre “déterminante” avec Jacques Stotzem. J’étais perdu devant l’étendue du choix dans le magasin et coincé par mes économies étriquées, il m’a conseillé une guitare coréenne, une Takeharu.
Les guitares Takeharu étaient une marque de la société Kiso Suzuki Violin fabriquée entre 1973 et 1979. Elles sont le résultat d’une collaboration entre le compositeur Yamamoto Takeharu et lae fabricant de violons Kiso Suzuki. On ignore quelle a été la contribution de M. Takeharu à la conception de ces guitares, ainsi que les raisons de la fin de cette relation. Mais ce que l’on sait, c’est que la marque est très appréciée des propriétaires. La guitare de la marque Takeharu a une étiquette signée de son prénom “Yamamoto”.
Yamamoto Takeharu (né le 22 mai 1925) est un guitariste et compositeur qui a joué un rôle important dans la propagation de la popularité de la musique pour guitare au Japon. M. Takeharu a étudié auprès du compositeur Masao Koga (qui était un célèbre guitariste et compositeur japonais et un pionnier de la musique populaire japonaise). En 2006, M. Takeharu a remporté le 48e prix de l’organisation Japan Music Award pour l’ensemble de sa carrière.
La guitare venait du magasin “guitare dans la note”, véritable institution au centre de Liège. A l’époque, il y avait un trou énorme sur le marché entre les guitares en carton bouilli et bois de cagette injouables et les premiers instruments sérieux avec au moins une table massive ou en contreplaqué de qualité.
Les Asiatiques ont eu le bon goût de commencer à fournir des instruments décents à prix abordables (mais bien plus chers que les instruments actuels). Compte tenu de l’inflation, les 12000 BEF de l’époque correspondent à environ 580 €.
Un peu de chirurgie, un peu de boucherie
Le chevalet à deux vis lui avait valu le surnom de “Frankenstein”. Quelques années plus tard, le chevalet et son sillet suspendu ont été retravaillés pour un meilleur transfert des vibrations vers la table et vers le micro sous le chevalet. Ce travail a surtout consisté à bloquer les vis, corriger l’action et à soutenir le sillet sur toute la longueur par un insert en bois. Elle a également une grosse puce piezo Schaller collée quelque part sous la table.
Malmenée mais aimée
La pauvre aura subi bien des affronts et l’amour un peu rude d’un musicien adolescent. Victime de chutes et de chocs qui auraient pu être évités facilement avec quelques conseils de sécurité. Mais ailleurs c’est la pure patine des mains qui a fait son oeuvre. Elle m’aura suivi partout sans se plaindre, au kot, en soirée, à côté du feu de camp et en vacances (pour pêcho Miss Camping qui deviendra ma Lovely Roadie bien plus tard).
Attache de sangle vissée dans le talon avec une vis à bois, en mode bourrin. Sans parler des réparations douteuses (à la colle Pattex et au mastic de carrosserie).
Lors d’une semaine de stage où je donnais cours à des enfants débutants, un sale gamin avait violemment jeté ma guitare à terre, volontairement. Il a fallu un regard en glace carbonique instantané et un “non” de mon binôme pour arrêter la gifle que je venais de lui forger mentalement. Il aurait été décollé de son fond de culotte à coup sûr.
A l’époque, j’ai réparé avec ce qui me tombait sous la main : de la colle et du mastic de carrosserie. La réparation n’a pas bougé en tout cas.
Rejouer ?
J’ai changé les cordes, en essayant de me souvenir de quand datait mon dernier rappel Tétanos. En frissonnant à l’idée que pour certains c’est l’état normal des cordes.
J’ai nettoyé un peu le bois et réaccordé la guitare. J’ai gratté un peu. Elle sonne vraiment pas mal jusqu’au milieu du manche. Par contre elle est incroyablement épuisante pour le picking. Il faut vraiment beaucoup d’énergie pour la faire sonner.
Je me souviens comme le passage sur mon OM Bourgeois avait été une libération du son et du toucher. Elle ne jouent clairement pas dans la même catégorie. Elle aussi a eu droit à quelques caresses, un changement de cordes et un réaccordage. Mais ceci est une autre histoire …
1 Commentaire
Très belle histoire et historique de tes guitares.
Ces jours j’ai fait l’inventaire des guitares qui sont passées et de celles encore à la maison: j’en ai compté 17, dont 5 encore dans ma maison, et une prètée à vie a ma soeur. ( la Takeharu classique). J’ai encore une Hashimoto, 6 sont passées ailleurs (dont une très belle W350). Furch, Yamaha APX-8, Harmony Sovereing 1203, Seagull, Furch, Trio Suzuki… Il me reste une A&M S3, Avian Skylark fan fret Deluxe, Recording King, une simple Hashimoto W315 ( mais tellement de son!) et une Yamaha classique. Parfois j’ai regretté d’avoir vendu quelques-unes, mais quand je joue celles que j’ai maintenant c’est vite oublié. Ma recherche de son en restera là ( enfin, pour l’instant). Faut que j’aille changer mes cordes de certaines qui sont restées dans leur coffre trop longtemps…