Pauvres oreilles.
Je vois passer vos photos de festival. Quand les photos ne sont pas prises au moment d’acclamer vos artistes bras en l’air, dans les premiers rangs, pendant les morceaux, on en voit qui font la grimace, sourcils froncés, … la douleur est visible. Si les plus chanceux ont des bouchons de protection, d’autres se bouchent les oreilles … les autres sont provisoirement ou définitivement sourds.
Entendre, ou voir et souffrir, voilà le drôle de choix qui est laissé aux fans.
Je doute que ça m’arrive un jour, mais en tant qu’artiste, ça me ferait mal d’être sur une telle scène et voir que je fais souffrir les gens. Je veux les toucher, les émouvoir, les emmener en voyage … mais pas leur hurler dessus, par guitare interposée et leur casser les oreilles, littéralement. La musique doit être un plaisir. Je veux bien mettre la larme à l’œil aux gens, mais pas parce que je leur vrille les tympans. Bien sûr, faire trembler les murs est un plaisir particulier, et j’aime aussi faire vibrer le plancher d’un bon rock acoustique rageur … mais on reste en deçà du seuil de douleur.
Je me souviens d’un groupe punk qui jouait dans une salle. Les gens étaient agglutines au bar, ou aux issues de secours. Il était tout simplement impossible de rester dans la salle. Seul un noyau dur de fans, déjà sourds, se trémoussait sur la piste de danse.
Depuis deux jours, je “subis” les basses d’un festival qui a lieu à 7 km de chez moi. J’avoue, je ris jaune quand je vois qu’on persécute le moindre café-concert et les sauteries des mariages à coup de sonomètre et qu’ici on consomme tout le stock de dB et la patience du voisinage pour toute l’année.
Je me demande quand est-ce devenu une fatalité ? Les systèmes de sonorisation modernes ont pourtant des qualités de diffusion nécessaires pour rayonner partout sans nécessiter des volumes excessifs. Faut-il noyer toute nuance ?
En tout cas si ils veulent nous vendre leurs morceaux en fichiers lossless et du matériel audiophile, ça ne semble pas la bonne voie à suivre.