Pourquoi les premiers CD avaient une durée de lecture de 74 minutes ?

le CD, et ses 74 minutes de son cristallin

le CD, et ses 74 minutes de son cristallin

Après « Pourquoi les chansons font trois minutes ? » voici une autre question intéressante : Pourquoi les CD étaient-ils initialement limités à 74 minutes ? Pas 60 minutes, pas 70, mais 74 minutes. 

Comme pour la durée des chansons, il y a de bien jolies histoires que les gens racontent … qui sont fausses.

Une de ces jolies histoires parle de l’amour inconditionnel que portait le président de Sony, Norio Ohga à la Neuvième Symphonie de Beethoven. Ancien chanteur d’opéra, audiophile et passionné de musique classique, il aurait exigé que le nouveau support puisse contenir la Symphonie n°9 en Re mineur Op. 125, oeuvre magistrale de Ludwig van Beethoven. D’autres prétendent que c’était pour répondre à cette même demande de la part de son épouse.

Ludwig van Beethoven

Ludwig van Beethoven (source : Wikipedia)

La plus longue version enregistrée de cette symphonie était une version lente de 74 minutes dirigée par Wilhelm Furtwängler Bayreuther Festspiele de 1951, ce qui aurait imposé le format final.

Une autre variante prétend que le chef d’orchestre autrichien, Herbert von Karajan aurait exigé la même chose, condition indispensable pour apporter le support de sa notoriété à ce nouveau format, initialement pensé pour répondre aux exigences sonores des amateurs de musique classique.

La vérité est moins romantique, plus triviale, plus économique et technique, comme souvent …

Lors de la création du format CD en 1980, Philips et Sony (et Hitachi) se sont partagé les brevets de cette nouvelle technologie. Selon le Red book, qui fixe les modalités techniques et suivant les conditions d’exploitation commerciales du CD définies par ses inventeurs, Philips se charge de la conception du CD et du mécanisme de lecture, tandis que Sony se charge de définir un format de numérisation et un procédé de correction des erreurs de lecture.

surface d'un CD (source : Wikipedia)

surface d’un CD (source : Wikipedia)

Selon les formats d’échantillonnages définis par Sony et Philips, un disque de 10 cm de diamètre, qui était le format initialement choisi par Sony, permettait de stocker 60 minutes de musique, suivant les contraintes de la lecture optique à l’époque. Le succès des cassettes audio avait démontré que cette capacité était commercialement suffisante.

Philips qui, dans les spécifications du Red Book, travaillait sur le support et les lentilles de lecture avait opté pour des prototypes de 11,5 cm permettant de stocker un peu plus d’une heure de musique.

Au moment de lancer la production industrielle, Philips aurait eu un avantage grâce à une chaîne de production capable de fournir rapidement ces disques de 11,5 cm, ce qui ne faisait pas les affaires de Sony qui prenait du retard sur la fabrication des lecteurs. Philips ne souhaitait pas favoriser le format de 10 cm propre à Sony, pour les mêmes raisons.

Le compromis fut le disque de 12 cm qui ne donnait l’avantage à aucun des deux fabricants, tout en permettant d’utiliser tous les développements techniques et électroniques mis au point précédemment. Ces décisions ont été prises par le management et ont été imposées aux experts des équipes techniques. Un disque de 12 cm de diamètre avait donc un temps de lecture théorique de 74 minutes et 30 secondes. Tout comme pour la durée des chansons, c’est le support qui a imposé le temps de lecture.

Pour finir d’enterrer définitivement la légende romantique de la longue et lente Neuvième Symphonie de Ludwig van Beethoven, il faut considérer qu’à l’époque la durée maximale d’enregistrement plafonnait en pratique à 72 minutes car les premiers supports pour le mastering audionumériques étaient des cassettes vidéo au format U-matic, dont c’était la durée d’enregistrement maximale.

La version la plus longue de la symphonie de Beethoven n’aurait de toute manière pas pu trouver place en entier sur un CD avant 1988, date de l’introduction de nouveaux supports pour le mastering numérique.

Ceci a donc finalement conduit à la création d’un CD-ROM de 74 minutes et 30 secondes, de 120 mm de diamètre contenant 682 Mo de données.

Note: avec l’amélioration du guidage de la lecture optique et en jouant sur la densité des pistes, il a été possible de monter ensuite à 80 minutes, et même jusque 99 minutes.

4 Commentaires

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    • francis jurdan sur 1 novembre 2014 à 15 h 32 min
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    Bel article bien documenté mais pour la fin. quand on est monté a 80 minute ca n’est pas du tout en changeant la densioté ‘auquelq cas il aurait fallut changer les lecteurs/graveurs) mais tout simplement on continuant a ecrire plus pres du bord extérieur du disque. ce qui le rend encore plus fragile. (les dvd commencent tres souvent à s’user à la fin des films car c’est pres du bord et souvent manipulé).

    Autre petite anecdote, Philips voulait un cd à durée de vie très très longue et a fait les 1 er exemplaire en VERRE. mais l’industrie du disque n’a accpeté la mise en catalogue de leur artisrtes que si la durée de vie des disque était restrainte et calculée (Obscolescence programmée dont philips est un champion en la matière).
    Nos cd et dvd gravés ne durent pas 5 ans la plupart du temps.
    Mes 1 er cd PHILIPS de dire straits sont toujours lisible eux !

    1. En fait, on a joué sur les deux tableaux … en cours de développement, les progrès ont été tels qu’il aurait été possible de faire tenir les 74 minutes sur un disque de 10 minutes, mais le management a refusé de renégocier les standards définis. En jouant (légèrement) sur la tolérance de l’espacement entre les pistes (résultant de la tolérance aux erreurs de lecture) on a pu augmenter la densité des pistes ET en écrivant plus près du bord, on a gagné des minutes supplémentaires.

    • Christophe sur 4 novembre 2014 à 11 h 58 min
    • Répondre

    Mes CD à graver « produit blanc » des années 90 (environs 1997/98), utilisés à l’époque pour copier les collections de CD de mes potes sont toujours lisibles sans aucun problème… sur mon lecteur Marantz de 1999 dont c’est toujours la diode laser originelle… L’influence de la qualité du lecteur?
    Je n’ai aucun CD qui soit devenu illisible, pas même mon premier, acheté en 1989…

    1. A part ceux qui traînent dans la boite à gants de la voiture, et ceux que les enfants ont frotté à terre, j’ai peu de pertes. Être fumeur est préjudiciable aux lentilles des lecteurs, ça peut jouer 😉

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