Il drache sur l’autouroute et le GPS n’est pas très optimiste sur l’heure d’arrivée à Saint Vith. L’ouverture des portes est à 20h, mon EAT (estimated arrival time) est à 19h45. Heureusement, je ne joue qu’à 21h15 !
Arrivée sur place et petite tergiversations à la billetterie entre « bad guy » qui veut me mettre son gros cachet à l’encre noire baveuse sur le dos de la main et « good guy » qui pense que ce n’est pas nécessaire pour les artistes. Pour une fois, devant mon manque évident d’enthousiasme pour le marquage du bétail, « good guy » l’emporte: mon poignet ne sera pas immatriculé et restera … immaculé.
Première surprise, on me confie la clé de ma loge. What ? MA LOGE ?
Un petit local avec un lavabo, un miroir, deux chaises et … une douche et un porte-manteau. Propre, rangé, sécurisé pour poser mes affaires, laisser ma guitare prendre le degré d’humidité et la température du lieu, me changer, m’échauffer et surtout m’accorder. Bien sur, ça fait plaisir de sentir qu’on joue dans la catégorie supérieure, c’est une forme de reconnaissance, mais c’est aussi un confort indispensable. Pouvoir m’isoler pour prendre ma respiration avant de jouer.
Les musiciens ont droit à quelques boissons, de la soupe et des petits-pains garnis.
J’en profite pour poser le matos et aller tendre l’oreille sur la prestation d’Omnitah, charmante chanteuse qui s’accompagne au piano. J’aime beaucoup à la fois le placement de voix et les atmosphères, et je regrette de ne pas pouvoir rester pour en profiter jusqu’à la dernière note, mais je dois préparer mon matériel puisque pour une fois, je ne prends pas tout mon attirail sur scène.
Je monte sur scène, avec un léger retard suite aux rappels mérités d’Omnitah qui s’en excuse en quittant la scène. Mais franchement, qui lui en voudrait, c’est toujours comme ça
En regardant la prestation d’Omnitah, je me rends compte que tout le matos qui se trouve sur scène est à elle, y compris le pied de micro. Naïvement, j’ai pensé que dans une organisation de type festival, des choses comme les micros d’annonce sur pied feraient partie du setup de base. Heureusement mon micro fait toujours partie du trajet, et le technicien me dégote un pied.
J’avais prévu d’utiliser mon ampli comme retour en m’appuyant sur la sono sur place pour diffuser le son dans la salle. mais apparemment il n’a pas été prévu de brancher les premières parties dans la façade qui sera réservée au dernier groupe de la soirée. Entre Omnitah, mon public et ceux qui attendent les accordéonistes « Didier Laloy et Tuur Florizoone » suivi de « Jazz Dust » la salle est comble. Avec environ une centaine de personnes dans la place, mon ampli est à la limite, surtout parce que le bar est bruyant. Ceux qui écouteront, entendront. Comme prévu, ce festival est une belle occasion de faire connaître mon univers musical à d’autres gens. Je joue donc peu de reprises et me focalise sur mes compositions.
Je débute par Our Song, suivi de Lovely Roadie … et enfin Wicked weasel. Le passage par la loge me permet de jouer juste sans devoir tout le temps me réaccorder. Pendant ce troisième morceau, le technicien passe et repasse derrière moi en portant du matos, installe une console, la branche et me branche enfin sur la façade, … au milieu de mon morceau ! Je passe instantanément à 250% du son initial dans un morceau énergique, je suis obligé de lever le pied et de faire barrage de mon corps devant l’ampli pour ne pas partir en Larsen. Je suis un peu déstabilisé surtout que je n’ai pas l’habitude de jouer léger dans ce morceau, mais malgré tout, c’est mieux pour le public.
Avant le morceau suivant, « Entre chien et loup » je peux diminuer l’ampli guitare et le son sera bon pour la suite. Le bar est bruyant comme à son habitude, mais j’apprécie que pendant les balades plus lentes, le silence et l’écoute s’installent.
Les morceaux seront très bien applaudis dans l’ensemble et je prends beaucoup de plaisir à jouer. Caravansérail joué en live reste un moment magique pour moi, même si ce morceau est déjà ancien (je l’ai joué à mon premier concert), et je me demande si il donnera bien sur mon futur CD.
Je joue ma cover de « Smoke on the Water » qui étonne et enthousiasme visiblement la salle … Je termine mon set par un très vieux morceau de Jacques Stotzem « Training ». C’est un moment de nostalgie, avec un son 80’s et du chorus, pour un des premiers morceaux qui m’avait marqué et donné l’envie de passer la vitesse supérieure au niveau guitaristique.
Belle salve d’applaudissement, remerciements et direction la loge. J’ai un petit regret de ne plus avoir de CD à proposer ce soir, j’en aurais vendu. Je quitte la scène en ayant respecté mon temps de jeu, avec le même retard de dix minutes avec lequel j’ai débuté. Je dois libérer la loge pour dix heures et il est dix heures et quart, déjà. Je transfère une partie du matos dans l’auto, mais je garde ma guitare près de moi, je ne me sentirais pas à l’aise de l’abandonner sur un parking.
Le moment est venu de profiter d’une soupe, et d’un petit-pain garni avec un bon verre de vin. Le repas d’après scène est toujours un moment particulier. La nourriture semble toujours très bonne, l’excitation et l’adrénaline retombent, il y a un sentiment d’accomplissements, de l’émotion, quelques regrets et des questions: comment était le son, tel ou tel morceau était ok, la voix passait bien ?
Je regrette un peu de m’isoler si vite sans saluer les gens venus m’écouter, mais heureusement, je les retrouve plus tard en repassant boire un verre dans le hall d’entrée.
Retour vers Liège et debriefing de ma soirée et de ma vie en général avec ma Lovely Roadie, cet autre moment magique qui n’appartient qu’à nous deux.