Ce sentiment dont je finirai par me faire un ami !
Le sentiment d’imposture est cette intime conviction de ne pas mériter ce qui nous arrive (que cette chose soit infime ou grande) et de ne pas être la bonne personne au bon endroit. On en parle peu, voire on s’en cache, mais en off, je constate que beaucoup de monde (moi en premier) en souffre à des degrés divers. En tant que créatif, sans mandat défini, sans mission et sans légitimité de fait, c’est presque normal d’en être atteint de temps à autre.
Pourquoi moi ? Qui suis je pour mériter ça ? Ce que je fais n’est guère mieux que ce que font les autres ? Et si ils se trompaient sur moi ?
Pour ceux qui me connaissent un peu, je suis un mec avec plusieurs facettes, a la fois fonctionnaire, ex-membre d’une escadrille virtuelle d’avions de combat, blogueur, musicien, passionné de photo, père de deux merveilleux enfants, ancien membre d’un comité de baptême passionné par le folklore et les chants paillards.
Tous mes univers sont entiers et assumés, mais chaque fois qu’ils se croisent, je suis surpris. Quand quelqu’un a la saint Toré (une fête d’étudiants) me reconnaît et me félicite pour mon concert au Senor Duck avec l’harmoniciste Olivier Poumay, puis m’invite à afonner un get27, en toute amitié folklorique, je suis décontenancé. Quand un collègue me tape sur l’épaule pour me demander si c’est bien moi le gars qui est cité dans les 100 blogueurs influents par le Vif, à part oui, … que dire. Quand mon fils me dit qu’il aimerait me voir à la télé avec ma guitare et voir des affiches de moi partout (et accessoirement gagner plein d’argent, pour acheter des jouets), je lui dis que je fais de la musique et que mon but n’est pas d’être populaire.
J’ai séparé ces mondes et les personnes associées sans effort particulier, sans peur, simplement avec une sensation de ne pas mettre de l’eau dans l’huile et vice-versa.
C’est un sentiment, qu’il ne faut pas confondre avec la véritable imposture qui est un mensonge sur qui nous sommes. Nous sommes bien « nous » sans fausse-note, dans cette place que nous avons ardemment désiré, mais nous souffrons du décalage entre l’image de nous et l’image miroir que nous renvoient les autres. C’est donc également un sentiment intime, qui est lié à la vision que nous avons et que nous donnons de nous.
Heureusement, j’ai quelques bonnes nouvelles:
- ce n’est qu’un sentiment, et un sentiment s’apprivoise
- il est lié à une certaine réussite (même minime), ce qui est une excellente nouvelle
- il est lié à une dynamique de doute, de remise en question, de quête de l’excellence, ce qui est également une bonne nouvelle, car ‘l’artiste qui se trouve se perd’
- il est lié au mouvement, contrairement à la dépression du créatif qui naît et se nourrit de l’immobilité
Ce n’est donc pas un sentiment destructeur ou bloquant … il est au contraire créateur, dynamisant et structurant car il va tirer la sonnette d’alarme pour toujours chercher le meilleur de chaque pas en avant.
La meilleure nouvelle, c’est que quand je joue devant un public, ce sentiment n’existe tout simplement pas …