TC Electronic PolyTune Clip, l’accordeur clip ultime ?

Avec le TC Electronic PolyTune Clip, TC Electronic propose une version électronique de son accordeur polyphonique pour basses et guitares.

TC Electronic PolyTune Clip Tuner

TC Electronic PolyTune Clip Tuner

J’aime beaucoup ma pédale Polytune qui permet en mode polyphonique d’un seul brush de haut en bas de vérifier si toutes les cordes sont accordées. Ensuite, il suffit de jouer une corde individuellement pour passer en affichage individuel automatiquement et accorder chacune des cordes en mode monophonique.

Tout ceci est maintenant disponible sous forme d’un clip.

En bref:

  • précision +/- 0.02 %
  • écran lisible
  • mode aiguille ou stroboscopique
  • mise en veille automatique
  • possibilté d’ajuster la fréquence d’accordage entre 435 – 445 Hz
  • correction automatique de l’orientation de l’affichage
  • accordages divers jusqu’au Si et prise en compte du capodastre jusqu’à la septième case
  • prix 49€
  • mode guitare ou basse
  • pas de mode open-tuning, ni drop-D qui était présent sur les pédales polyphoniques

Mon avis :

J’aime beaucoup les fonctionnalités, l’écran est splendide, mais je trouve le look « industriel » de la pince moins réussi (mais ça c’est subjectif). Le prix peut sembler élevé, mais vu les fonctions proposés qui sont et restent un réel progrès dans l’accordage, et les aspects pratique d’un clip, c’est amplement justifié.

Note : dans la boite, vous trouvez un code pour installer l’application Polytune sur votre Smartphone, c’est sympa aussi ça.

Soirée en guitare(s) et musique(s) à l’IFAPME de Limal (Wavre)

Une belle semaine musicale pour moi, du samedi, avec un beau Contes & Guitare à Aywaille, mardi soir, un chouette duo acoustique à Ostende, à ce samedi, un concert très particulier à l’IFAPME de Limal. Un concert particulier parce que pour une fois, j’échappe à ce que je surnomme « la Schleppe » (du verbe allemand schleppen : traîner, porter, remorquer – un mot que je pense avoir inventé, avec une impression de déjà-vu dans le jargon des bateliers). Rien à porter, pas d’amplis, pas de mallette de câbles, pas de pieds de micros, pas de fond de scène ou d’éclairage, même pas ma guitare ! Mais stupidement, le stress d’oublier quelque chose est encore plus marqué que quand j’emporte tout, en double.

Le but de la soirée « GuitArt concert – Sans luthier, pas de guitare ! » est de jouer sur les instruments fabriqués par les sept premiers diplômes de la section lutherie de l’iFAPME. Après une première rencontre avec les élèves, j’ai choisi deux instruments, un ukulélé et une guitare folk plutôt traditionnelle (qui convient à ma technique plutôt traditionnelle) dans l’éventail des instruments proposés.

Je suis largement en avance pour le soundcheck et je découvre la salle communale de Limal.

Salle communale de Limal - IFAPME

Salle communale de Limal – IFAPME

Finalement, ça tombe bien que je sois en avance, on va pouvoir prendre un peu de temps pour le soundcheck. Je chipote un peu pour trouver mon bonheur. Toutes mes constantes sont bousculées ce soir. Je suis habitué à jouer de la guitare debout, dynamiquement, en bougeant mon corps, et le la combinaison du tabouret et d’un micro SM57 ne me satisfait pas entièrement, pas plus qu’elle ne semble satisfaire le responsable du son. Le son est bon dans une marge de positionnement très réduite. Nous optons finalement pour un petit micro-cravate accroché au bord de la rosace. Pour ceux que ça intéresse, je pense qu’il s’agissait d’un Audio-Technica AT831b. Le même micro servira pour le ukulélé.

Toutes les guitares sont prêtes, et les élèves sont très attentifs aux commentaires des musiciens très exigeants.

Soundcheck Kevin Mullighan - IFAPME

Soundcheck Kevin Mullighan – IFAPME

Depuis mon premier essai, les instruments ont encore été améliorés. Les nouvelles cordes nylon du ukulélé ont un son intéressant, c’est du bionylon de chez Aquila, un polymère à 68% d’origine végétale. La folk a un réglage aux petits oignons et le toucher du vernis me semble amélioré, mais je suis un peu moins enthousiaste pour le son des cordes GHS qui manquent un chouïa de percussion dans les basses. Tout ceci est subjectif et à la limite du perceptible, mais pendant le bref instant d’un morceau tout votre univers se résume à vos deux mains et au son acoustique et amplifié que vous produisez.

De la guitare romantique, avec une intéressante réplique inspirée des guitares de la fin du XVIIIeme (si mes informations sont exactes) en passant par les archtops, à l’électrique 7 cordes, l’assortiment d’instruments est vaste et chacun oeuvre à mettre le mieux possible en valeur le travail des élèves.

Quand je vois les belles guitares archtops, je comprends pourquoi les élèves affectionnent d’en fabriquer. Ce sont des instruments superbes où la personnalité du luthier a de la place pour s’exprimer. Et de la personnalité, ils en ont, les diplômés de l’IFAPME, comme le prouve le plateau de guitares présenté.

Je suis content de constater que d’autres avec bien plus d’expériences que moi ont opté pour la même guitare que moi … c’est rassurant !

Concert Guit'Art - IFAPME

Concert Guit’Art – IFAPME

Le soundcheck continue … je prends quelques photos, et je joue et rejoue du petit ukulélé qu’on me prête pour stabiliser les cordes qui ont encore tendance à bouger un peu.

Soundcheck - IFAPME

Soundcheck – IFAPME

Ce soir, se succéderont divers musiciens : Jean François Letraublon, Flavio Macies de Suza, moi-même, Steve Louvat, Oli F. (Olivier Fivet), Fred Hyat, Kevin Mulligan, Marc Lelangue. Ils jouent sur les guitares de Sophie Weber, Mathieu Clavie, Denis Joris, François Leroy, Lionel Maertens et Alexandre Vandreche.

Soundcheck - IFAPME

Soundcheck – IFAPME

Du point de vue sonorisation, un tel concert est un casse-tête, car il faut sonoriser chaque instrument, chaque artiste avec des changements de plateau permanents après deux ou trois morceaux. Les élèves de la formation « Réalisateur audiovisuel » sont là pour filmer le concert mais également pour diffuser des petits clips des sponsors et la présentation d’images de la conception des guitares. C’est la quadrature du cercle pour arriver à équilibrer le son entre des interventions en clip vidéo et le plateau live pour donner du rythme à la soirée. Bravo et merci à eux !

On est bien reçu, une assiette froide nous attend et le bar nous est ouvert. Certains sautent le repas, pris entre le stress positif de l’organisation de la soirée et l’émotion palpable de la fin d’un parcours commun. Pour ma part je mange un bout en attendant que les soundcheck se terminent. Il me reste du temps, et le repas est suffisamment léger pour ne pas m’encombrer au moment de jouer/chanter.

La salle se remplit, les dernièrs ajustements de la conduite se font en coulisse et chacun prépare son intervention. Chaque artiste est introduit par Manu Wilmots, ensuite l’artiste monte sur scène et l’élève lui apporte ensuite l’instrument qu’il a fabriqué et l’aide à s’installer et à ajuster ses micros. Je me marre : un jour en voyant M en concert, j’avais dit à ma Lovely Roadie que je trouvais ça classe d’avoir un gars qui accorde ta guitare et l’apporte sur scène. Toutes proportions gardées, on dira « voilà, ça, c’est fait ! ».

Après les discours officiels et la présentation des partenaires comme Music Fund, la soirée commence par le classique avec quelques pièces brillamment jouées sur la guitare romantique qui semble s’accommoder merveilleusement bien de la prise du son au micro. Ensuite, après Paris et l’Italie de la fin du XVIIIème nous partons vers le Brésil avec un peu de musique latine. Je n’ai pas de photos de ces interventions, car ensuite, c’est mon tour et je me prépare en coulisse.

J’ai un peu l’impression de secouer la salle après la douceur suave des sons latinos. Je débute au ukulélé, avec un classique du blues écrit par Jimmy Cox en 1923, Nobody knows you, un titre redécouvert à la guitare sur le Unplugged d’Eric Clapton, suivi de deux classiques, Fly me to the moon (B. Howard 1953)  et Side by Side (G.Kahn, Harry M. Woods,1927). Ces morceaux sont enracinés dans les trois vagues de popularité du ukulélé qui se sont produites aux Etats-unis, aux environs de 1920, en 1950 et plus récemment (voir ce billet sur le regain de popularité du ukulélé). Pour illustrer la renaissance plus contemporaine du ukulélé, j’avais choisi d’interpréter également un dernier morceau plus récent, Guaranteed d’Eddy Vedder, mais je choisis d’écourter mon set d’un morceau pour mieux coller au rythme de la soirée.

Je m’installe avec la guitare pour interpréter Finger Stomp de Jacques Stotzem, un morceau qui varie les sonorités entre le fingerpicking, un peu de pompe jazz, et du frailing qui évoque Johnny Cash. Il fait une chaleur moite, mes doigts glissent sur les cordes et je ne me sens pas à l’aise partout sur cette guitare que je touche pour la seconde fois, et je ne suis pas personnellement enthousiasmé par mon interprétation technique … la position débout (me) convient décidément mieux pour les morceaux qui groovent. Un aspect du contrôle qui reste à travailler de mon côté, pour l’album à venir.

Comme second morceau, j’ai choisi une composition personnelle « Entre chien et Loup« . Ici la sonorité chaude et bien arrondie de la guitare fait merveille et ça se passe plutôt bien. Le public apprécie et ce morceau me vaut pas mal de commentaires positifs pendant la soirée. Olivier Fivet qui jouera plus tard me confiera en coulisse avoir écrit une chanson sur ce thème sur son premier album, un album dont Steve Louvat qui joue ce soir également, a fait les guitares, amusante coïncidence.

Concert Guit'Art - IFAPME

Concert Guit’Art – IFAPME

En discutant avec les autres musiciens que je connais de nom pour la plupart, je découvre des gens charmants, impliqués, tout autant préoccupés des détails des guitares et du son (et moi qui pensais être un emmerdeur !). Pour ces rencontres également la soirée est une merveilleuse réussite, même si parfois je m’emmêle les pinceaux sur ce que je crois savoir de leur parcours artistique … en mode « ah, c’est toi qui … » – « ah non, non, pas du tout » … les relations publiques, ce domaine où j’excelle si peu.

Après Steve Louvat, la soirée continue avec Oli F. en duo avec Fred Hyat, puis le répertoire blues de Marc Lelangue et enfin Kevin Mullighan.

Concert Guit'Art - IFAPME

Concert Guit’Art – IFAPME

Concert Guit'Art - IFAPME

Concert Guit’Art – IFAPME

Concert Guit'Art - IFAPME

Concert Guit’Art – IFAPME

Je passe une excellente soirée, baignée de musique(s) et de guitare(s) et d’une ou deux bières. Il est temps de saluer tout le monde et de rentrer chez moi … mission accomplie. 

J’espère que d’autres images et des vidés suivront, dans les jours qui viennent.

Duo acoustique chez Napoléon …

Jouer en duo acoustique au Fort-Napoléon, quelques jours après le bicentenaire de la bataille de Waterloo, c’est pas bien échu ça ?

Dans la continuation des marchés de Noël, réceptions de Nouvel-an et autres corporate-events, notre duo acoustique avec Mieke a encore été sollicité pour animer une réception. Cette fois-ci, c’est à l’autre bout du pays, sur la côte, dans le Fort -Napoléon, un fort construit sous le règne de Napoléon Ier par des prisonniers de guerre espagnols afin de protéger le port d’Ostende des attaques anglaises (qui n’auront jamais lieu).

Le passé belliqueux est révolu et le joli petit fort restauré et rénové accueille un musée, et un bistro/resto où nous sommes invités à jouer.duo acoustique Fort Napoléon -Ostende-BEL (5)

Nous avons préparé environ une heure et demie de musique, tout en sachant que nous ne jouerons probablement pas aussi longtemps. Il s’agit de la soirée dite « social-event », une soirée de détente informelle dans le fil d’une longue réunion internationale consacrée à la conservation de l’environnement et de des ressources naturelles dans le Nord et l’Est de l’Atlantique. Pour avoir pratiqué et même organisé la logistique de ce genre de soirées, je sais à quoi m’attendre : un public bienveillant, dont l’attention et les discussions restent focalisées sur le boulot. Il s’agit d’être bien présent sans être gênant.

La voiture est bien remplie, ma nouvelle sono est de sortie … premier test dans la configuration duo acoustique guitare, ukulélé et deux voix. J’ai prévu d’arriver tôt pour avoir du temps pour m’installer et faire un bon soundcheck. Je trouve une place de parking juste au pied du fort, et l’accès handicapés vient à point pour passer le chariot avec le matériel. On nous invite à occuper un des angles du fort et j’installe la sono et nous révisons la setlist avec les indispensables rappels de quand et où il faut un capodastre.

Soundcheck au Fort Napoléon

Soundcheck au Fort Napoléon

Dans le silence du fort désert, je crois d’abord que ma sono ne fonctionne pas. Je suis habitué au petit souffle à vide de la plupart des sonos. Là, rien, … silence total. Je saisis mon ukulélé pour en avoir le cœur net … « billabalang » l’accord sort clair et net des moniteurs. Je continue à être impressionné par mon achat.

duo acoustique au Fort Napoléon - Ostende - BEL

duo acoustique au Fort Napoléon – Ostende – BEL

S’ensuit un petit échange de vues à propos de mon activité musicale grandissante avec le responsable (qui est étonné par la qualité du son) et qui aura une formule amusante : « sometimes work is a hobby gone wrong » (le boulot c’est parfois un passe-temps qui a mal tourné). Je note la formule pour plus tard.

Le responsable arrive et nous en apprenons un peu plus sur le déroulement de la soirée … nous ferons deux interventions musicales, l’une pendant l’apéritif, et l’autre pour le café. Nous anticipons que l’apéritif sera plus bruyant et le café on on sera plus « posey ».

J’avoue, j’ai un peu sous-estimé le brouhaha de l’apéro dans mon soundcheck, je pousse un peu le volume, sans exagérer, car plus on joue fort, plus les gens parlent fort, c’est perdu d’avance .. et ce n’est pas un combat de décibels. Par moment je peine à entendre la chanteuse et je navigue un peu à vue en me focalisant sur le son des instruments, un petit moniteur de retour serait le bienvenu.

Un petit groupe se détache pour venir nous écouter, verre à la main. Notre set se passe bien et pouce levé, sourires approbateurs et compliments en rafale directement à nous, ou indirectement à l’organisateur confirment que le public apprécie. Plaire à cette partie du public sans agacer les autres, pour moi le pari est réussi.

 

Au bout d’une grosse demi-heure, il est temps de passer à table … entrée-plat-dessert, un bon repas que j’accompagne exceptionnellement d’un verre de vin. D’habitude j’évite l’alcool quand je joue, mais je suis sur un répertoire moins technique …

Comme prévu, les conversations sont plus discrètes pour le second set, et nous pouvons mieux poser nos notes et nos voix.

Ensuite juste après le sentiment du devoir accompli, vient le moment de démonter pour prendre nos quartiers à l’hôtel « Thermae Palace« , un monument du tourisme ostendais. Une fois la voiture garée, le matériel monte dans la chambre avec moi, pas envie de me faire voler mes trucs pendant la nuit.duo acoustique Fort Napoléon -Ostende-BEL (21)

Je dois encore trouver un moyen de lutter contre l’insomnie d’après concert et je me tourne et retourne dans mon lit.

duo acoustique Fort Napoléon -Ostende-BEL (26)

La vue est classe quand même !

Le matin, c’est le plantureux petit déjeuner avec vue sur la mer et un crevettier avant de reprendre la route de la maison.

Reste encore à planter une épingle sur mon Pinterest sur la carte de Belgique de tous lieux où j’ai joué, pile au milieu du fort … et puis jeter un œil aux vidéos !

duo acoustique Fort Napoléon -Ostende-BEL (1)

Un magnifique concert et 20 sec. de vidéo pourrie

Dernièrement j’ai suivi – et mis imprudemment les doigts – dans un petit tweetclash entre la chanteuse Maurane et une (ex-?-)fan qui ne comprenait pas en quoi le fait de photographier et filmer un concert pouvait être gênant pour l’artiste et le public.

Smartphone-concert

En surfant un peu le net sur le sujet, la position de bon nombre d’artistes pourrait se résumer comme suit : pour permettre à tous la meilleure immersion possible dans l’expérience musicale d’un soir et par respect pour les personnes derrière vous et les artistes devant vous, ne vivez pas le concert à travers l’écran de votre smartphone.

C’est étonnant de constater la distance que les gens installent volontairement entre leur regard et le moment présent, bien qu’ils aient payé parfois cher le droit de vivre ce moment privilégié. Ils ont payé pour vivre un moment unique et éphémère, comme on paye pour voir un tableau d’un grand-maître, ça ne donne pas le droit de gratter le vernis du bout de l’ongle. Comment, filmer et photographier ne feraient pas de dégâts ? Détrompez-vous !

Personnellement, je me souviens d’un concert de Jacques Stotzem où les rafles d’un déclencheur peu discret d’un « paparazzi » du premier rang m’empêchaient d’apprécier les balades dans un théâtre au son exceptionnel. A Eurodisney, un imbécile filmait le son et lumière avec son iPad  tenu à bout de bras. La petite led de sa tablette, ridiculement inutile a plus de 60 mètres du sujet filmé, éclairait le dos des personnes devant lui d’une lumière crue, ruinant le moment pour une bonne dizaine de personnes au minimum.

Il fut une époque où des petit futés se scotchaient un enregistreur sur le mollet pour enregistrer les concerts sous le manteau et  revendre des cassettes sous le manteau également. Ces jours où la musique était une denrée rare, où les albums sortaient au compte-goutte, sont révolus. Plus personne ne paierait pour un enregistrement sous le manteau, quand les gens ne sont même pas disposés à acheter la version studio d’une chanson ou un bon enregistrement live.

Un concert est un moment éphémère par nature. Nous sommes en train de perdre cette notion du moment unique qui ne reviendra jamais, un moment de communion entre ceux qui avaient la chance d’être là. Les vidéos, et dans une moindre mesure les photos, détruisent cette intimité précieuse avec l’artiste et donnent une vision déformée, floue et de mauvaise qualité à ceux qui n’étaient pas présents à cet instant. Quant à ceux qui photographient et filment, leur esprit reste focalisé vers l’extérieur, pas sur la jouissance du moment.

Si encore l’image était de bonne qualité … mais vous avez raté un moment de partage avec l’artiste, ruiné le show des gens derrière vous, juste pour une minute de vidéo tremblante et floue au son douteux. Une vidéo que 20 personnes viendront regarder là où la publierez, à moins que l’artiste ne dérape sur une peau de banane et se casse la jambe sous vos yeux ravis d’avoir saisi un moment unique (oubliant que le vrai moment unique était le concert). Au bout de quelques heures, votre vidéo sombrera ensuite dans l’indifférence numérique, mais jamais dans l’oubli. Si vous êtes fan, pensez-vous rendre service à l’artiste que vous aimez ?

Imaginez qu’un ami vous raconte un concert mémorable et que vous êtes envieux. Imaginez maintenant assister à ce concert sur l’écran d’un smartphone … ce sera sans aucun doute beaucoup moins convaincant et ne rendra pas justice au récit enflammé qu’il vous en faisait. La chose remarquable avec l’humain est que sa mémoire est faillible. Nos souvenirs sont amplifiés, embellis et nous transforment. Nous digérons nos expériences et elles deviennent uniques pour nous. Les photos et vidéos nous empêchent de faire ce travail de sublimation du moment en émotions durables. Au pire quelqu’un d’autre mieux placé et mieux équipé que vous aura filmé et une petite recherche Google suffira.

Ce que vous filmez ne ressemble à rien, et n’intéresse finalement pas grand-monde. Vous vous privez du contact avec l’artiste et privez celui-ci d’un moment d’émotion avec vous. Et pour finir d’enfoncer le clou, c’est du vol pur et simple. Le contenu musical et l’image des artistes relèvent du droit d’auteur et ne peuvent pas être reproduit sans autorisation, surtout de d’une façon aussi techniquement médiocre.

Les artistes de leur côté sont sensibles à cette attente du public et ils travaillent pour vous offrir du contenu de qualité maîtrisé. Offrir est à prendre au sens littéral car ce travail de promotion n’est par directement rémunéré. Nourrir et mettre en appétit les fans en garantissant la meilleure expérience possible est un travail précis qui nécessite le contrôle de l’image  depuis l’avant de la scène ou derrière votre écran d’ordinateur. Ceci explique la déception et la colère des artistes et de leurs équipes par rapport à tout ce qui peut se retrouver sur le net.

Personnellement, les photos et les vidéos prises lors de mes concerts ne me dérangent pas, et je les récupère en général pour les intégrer à mes comptes rendus. Mais il y a un monde de différence entre quelques photos prises et un mitraillage incessant ou des Smartphones tenus à bout de bras toute la durée du concert, que je n’ai évidemment pas encore vécus. Je pense à un ami qui avait pour seule vidéo disponible d’un bon concert, un bref et embarrassant moment où les dieux du son les avaient abandonné. Pourquoi partager ce moment ? Est-ce vraiment tout ce que les gens retiendront de ce concert ?

Au concert de Robbie Williams, le CD du concert du jour était en vente une demi heure à peine après la fin du concert. Un joli tour de force technique et commercial.

Pourquoi ne pas limiter les photos au premier quart d’heure, comme dans certaines conférences de presse ?

Mais de toute manière, au resto, au concert, voire en vacances … si notre Smartphone restait un peu plus longtemps dans notre poche ?

Que sera le futur ? Deux tendances cohabitent. Des applications, comme Periscope, permettent le livestream d’événements ou de moments. C’est une direction future possible, où nous vivrons les concerts par les yeux de ceux qui pourront se payer les places. D’autre part, des applications comme Snapchat renouent avec l’aspect éphémère qui donne de la valeur et du sens au moment en lui permettant de devenir un souvenir.

L’évolution du marché musical le démontre à souhait, la technologie est plus puissante que l’art de nos jours et le combat semble perdu d’avance. Mais prendre conscience de nos actions et de leurs implications n’est jamais inutile. 

Note: de manière assez ironique, j’ai rédigé ce billet sur mon Smartphone, dans le train. C’est dire si je n’ai rien contre la technologie et son ubiquité.